24 décembre 2007

Révolte

Pour une fois, je souscris à un appel du président de la république [mais en raison de l'étroitesse d'esprit dont il fait quotidiennement montre et de la dégradation des valeurs républicaines, je lui refuse les majuscules] demandant aux catholiques français de s'engager davantage dans la société.

Je veux d'abord lui renvoyer son ignorance. Dans ma ville, le maire, PS, est à la messe tous les dimanches. Parmi les conseillers municipaux, PS, il y a notamment le responsable de l'épicerie sociale (qui s'occupe aussi de la préparation au baptême dans la paroisse). Peur-être les valeurs humanistes apportées par le christianismes sont-elles plus difficile à trouver chez des Devedjian, Vanneste, Hortefeux ?

Je veux ensuite lui renvoyer sa situation personnelle, complaisamment étalée dans la presse aux ordres. Alors que tant de divorcés profondément croyants sont blessés par l'interdiction qui leur est faite de communier - même si, heureusement, nombre de clercs ferment les yeux - aller se faire nommer chanoine par le Pape relève au mieux de la débilité profonde, au pire de tares que la charité chrétienne m'ordonne de taire.

Je veux enfin lui dire que si les chrétiens s'engagent encore plus dans la vie publique, ce sera sans nul doute pour rejeter la société fondée sur l'argent et la haine (mépris des pauvres, des anciens, xénophobie, racisme) qu'il défend et établit.

Gloire à Dieu et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté - et mon incroyable optimisme ne me fait pas désespérer qu'il soit un jour touché par la grâce, qu'il reprenne sa première épouse, libère les prisonniers, bloque l'inflation, cesse de vendre des armes aux pays pauvres, et laisse Patrick de Carolis gérer seul Antenne 2.

23 décembre 2007

Au nom de la loi

Grâce à Bakchich, nous avons un aperçu du travail de législateur de nos députés... de quoi ne pas regretter que cela soit fait par une assemblée-croupion...

Femmes, Belges ou conducteurs d'aérotrains : la loi simplifie votre vie

Un courageux collaborateur de Bakchich a pris du temps à la veille des fêtes pour lire les 254 articles de la loi de « simplification du droit ». Inventaire à la Prévert des abrogations législatives

On se demandait pourquoi le gouvernement tarde à mettre en œuvre de vraies réformes. On sait désormais qu’il était occupé jusqu’à présent à des sujets très urgents. Une loi publiée le 20 décembre sous la signature de Nicolas Sarkozy, François Fillon, Jean-Louis Borloo, Michèle Alliot-Marie, Christine Lagarde, Rachida Dati, Eric Woerth et Christian Estrosi, se préoccupe, en 254 articles et sous articles, de la « simplification du droit ». Une lecture attentive montre qu’il était en effet urgent d’intervenir. Le texte confirme l’abrogation des lois ouvrant des crédits pour les années 1880, 1882, 1900, 1905, 1898, 1899, 1909, 1910, 1911, 1922 (dans cet ordre). Restait-il des reliquats non dépensés ? Si c’est le cas, c’est scandaleux : demandons que chaque année une loi confirme que l’année précédente s’est bien terminée à la fin de l’année précédente. Avec l’abrogation de la loi de 1922 « supprimant dans les actes de naissance des enfants naturels les mentions relatives au père ou à la mère lorsque ceux-ci sont inconnus », les mairies se demandent s’il faudra désormais inscrire le nom des parents inconnus dans les actes de naissance. La loi de 1960 « fixant les conditions dans lesquelles les mineurs de fond des mines de combustibles minéraux solides accompliront leurs obligations militaires » est aussi abrogée. Les mères des intéressés sont rassurées, depuis le temps qu’elles se demandaient si leur fils mineur allait partir à la guerre.

La loi de 1851 sur « les ventes publiques, volontaires, de fruits et de récoltes pendants par racines » est abrogée (enfin !), mais qu’en est-il du régime des ventes involontaires de fruits pendant par les racines ? La loi de 1905 « supprimant l’autorisation nécessaire aux communes pour ester en justice » étant aussi supprimée, la suppression de la suppression vaut-elle restauration ? Et est-ce lié aux prochaines municipales ? Mystère. De même, la loi du 28 décembre 1904 « portant abrogation des lois conférant aux fabriques des églises et aux consistoires le monopole des inhumations » est supprimée. Les fabriques des églises retrouvent-elles ainsi le monopole des inhumations ? Ce serait un geste bienvenu d’un Chanoine envers son Pape. De nombreuses lois concernant les femmes, les Belges, les aérotrains ou encore les « camions-bazars » sont aussi supprimées, ce qui est bizarre, quand on sait que les Belges ne sont pas électeurs et que les conducteurs d’aérotrains ne sont pas spécialement de droite. La loi confirme en outre que le tribunal de cassation, disparu depuis deux siècles, n’existe plus - sans doute une idée de Rachida Dati. Au passage, la loi de 1945 nationalisant les usines Renault est aussi abrogée, de même que la loi instituant le Conseil national du travail (la concertation avec les travailleurs mérite bien une petite simplification du droit). Mais il est vrai que la nouvelle loi comporte aussi des dispositions utiles, par exemple pour savoir que faire en cas de « vacance de poste du président du tribunal de première instance de Mata-Utu ».

Précisons enfin que l’article 27-II-22 de ce texte confirme l’abrogation de la loi de 1935 tendant à la répression des fraudes sur le guignolet. Rien n’est dit sur le guignolet-kirsch ni sur le picon-bière. Heureusement, l’article 30-IX-1 précise que la loi est applicable dans les Terres australes et antarctiques. Moralité : comme disent les Inuits, « si tu acceptes d’être pris pour un pingouin, ne t’étonne pas d’être gouverné par des manchots ».

Joyeux Noël !

22 décembre 2007

Caporal

Chez vive le feu, un texte d'Alain Badiou pour résumer l'année 2007...
"Il y a en France une tradition particulière qui est l'exact symétrique de la France universelle des Lumières et des droits de l'homme. Face à la Révolution de 1789, aux mouvements ouvriers du XIXe siècle, au Front populaire, à la Résistance et à Mai 68, il existe un autre courant, droitier et conservateur, qui combine un certain nombre de traits. Ses aspects sont connus: présenter comme révolutionnaire une politique réactionnaire; valoriser les modèles étrangers en laissant croire que la France est en retard; désigner une minorité comme suspecte et proposer son contrôle et sa répression de manière énergique; enfin, montrer dans le passé un événement mauvais avec lequel il faut en finir. Mai 68 dans le cas de Sarkozy, le Front populaire pour Pétain. Cette tradition remonte en réalité à 1815, au moment où ceux qui avaient fui le pays à la Révolution sont revenus avec l'idée de la Contre-Révolution. Il existe depuis dans notre pays un conservatisme particulier qui apparaît régulièrement dans les moments de changements qui inquiètent. (...) J'appelle "pétainisme" ce courant dont le lien avec le sarkozysme est à mes yeux évident. (C'est un peu provocateur) et c'est voulu ainsi. Sarkozy est aussi l'homme d'une minorité revancharde qui instrumentalise la peur pour son intérêt. On a des indices de cette revanche: une droite enfin décomplexée clamant que c'est très bien d'être riche et considérant que ce qu'il y a à dire aux pauvres, c'est qu'ils travaillent plus pour l'être moins".
Pétainiste, certes, mais avec un maniérisme tout proche du défunt Ceaucescu, dont le nom signifiait petit caporal...

18 décembre 2007

Je chante et puis j'oublie...

Tout le monde est une drôle de personne,
Et tout le monde a l'âme emmêlée,
Tout le monde a de l'enfance qui ronronne,
Au fond d'une poche oubliée,
Tout le monde a des restes de rêves,
Et des coins de vie dévastés,
Tout le monde a cherché quelque chose un jour,
Mais tout le monde ne l'a pas trouvé,
Mais tout le monde ne l'a pas trouvé.

Il faudrait que tout le monde réclame auprès des autorités,
Une loi contre toute notre solitude,
Que personne ne soit oublié,
Et que personne ne soit oublié

Tout le monde a une seule vie qui passe,
Mais tout le monde ne s'en souvient pas,
J'en vois qui la plient et même qui la cassent,
Et j'en vois qui ne la voient même pas,
Et j'en vois qui ne la voient même pas.

Il faudrait que tout le monde réclame auprès des autorités,
Une loi contre toute notre indifférence,
Que personne ne soit oublié,
Et que personne ne soit oublié.

Tout le monde est une drôle de personne,
Et tout le monde a une âme emmêlée,
Tout le monde a de l'enfance qui résonne,
Au fond d'une heure oubliée,
Au fond d'une heure oubliée.

14 décembre 2007

J'accuse !

Ce matin je suis en colère. Le New Jersey vient d'abolir la peine de mort, la France de la rétablir en condamnant à perpétuité un homme de mon âge pour un meurtre qu'il n'a probablement pas commis. Yvan Colonna est la victime du racisme anti-corse dont de nombreux amis corses m'ont déjà apporté le témoignage, et d'un système judiciaire dépendant d'un complexe politico-mafieux qui a occulté les réelles responsabilités.

Je pense à Yvan, je pense à sa famille, je pense aussi à la famille de Claude Erignac, qui ne parviendra jamais à faire son deuil au nom d'une prétendue raison d'Etat anti-terroriste.


Mise à jour.
14 décembre après-midi, je prends le bus 174 à la Défense. 3 individus s'installent derrière moi et commencent à discuter. "enfin Colonna a pris perpète, c'est très bien comme ça". J'ai envie de me retourner et de les avoiner... Ils descendent à Levallois, je me rappelle soudain avoir lu récemment que c'était là le nouveau siège des renseignements généraux. Vous savez, la gestapo de notre petit führer...

12 décembre 2007

Droits de l'homme et de la femme

Oui, j'ai apprécié ce qu'a déclaré le leader fasciste Kadhafi à Paris :
"Avant de parler des droits de l'homme, il faut vérifier que les immigrés bénéficient chez vous de ces droits", a déclaré Mouammar Kadhafi, selon la traduction en français de son discours prononcé en arabe.

"Nous sommes dans le pays qui parle des droits de l'Homme. Y-a-t-il certains de vos droits qui ne sont pas appliqués?", a demandé le dirigeant libyen, en s'adressant à ses "frères africains immigrés" présents dans le grand amphithéâtre du siège de l'Unesco, qui l'ont vivement applaudi.
"Nous sommes l'objet d'injustices. Notre continent a été colonisé, nous avons été réduits en esclavage, déplacés dans des navires comme du bétail. Aujourd'hui nous travaillons dans le bâtiment, dans la construction de routes (...). Après tout cela, nous sommes envoyés dans les banlieues et nos droits sont violés par les forces de police", a ajouté le colonel Kadhafi.

"Les Africains immigrés sont considérés comme des marginaux, des nécessiteux. Ils expriment leur colère parfois par la violence, allument des incendies", a-t-il ajouté, dans une apparente allusion aux violences dans les banlieues en France.
"Je réprouve la violence, mais ceux qui expriment leur mécontentement vivent des situations difficiles en Europe, cela mérite qu'on y réfléchisse", a-t-il ajouté. (source)
Prends ça, Jean-Marie Sarkozy !

J'ai aussi découvert le blog culture et politique arabe, qui nous apprend qu'un religieux a déclaré que si elle n'avait pas d'autre solution, la femme devait répondre à la violence conjugale par la violence... voilà qui ne fait pas avancer les choses, mais quand même...

7 décembre 2007

Représentativité

Une fois n'est pas coutume, un article de l'Humanité, qui rappelle que le MEDEF, Mme Parisot, ne représente pas grand monde dans le patronat, et n'est donc pas légitime pour exiger la destruction du Code du travail en cours au Parlement.

Le patronat vampirise l'argent public

Révélations . Représentativité quasi nulle, utilisation détournée de fonds publics, inefficacité économique… Une cadre raconte son travail au quotidien dans une fédération patronale.

« Caisse noire » de l’UIMM abondée à l’origine pour casser les grèves et désormais utilisée en bonne partie, semble-t-il, pour arrondir les fins de mois de ses dirigeants et de leurs amis, détournement des moyens de la médecine du travail ou encore de la formation professionnelle au bénéfice des certaines instances patronales…

Englués dans les révélations sur leurs petits arrangements entre amis, le MEDEF, ses fédérations professionnelles et leurs organisations territoriales connaissent une saison difficile… Malgré la lenteur de l’institution judiciaire qui a paru hésiter, deux mois durant, avant d’ouvrir hier, enfin, une information judiciaire sur les retraits suspects à l’UIMM. Et en dépit de la « bonne volonté » bienséante de nombreux médias alléchés, au début, à l’idée de pister les « syndicalistes corrompus » par les fonds secrets du patronat, mais un brin dépités après avoir fait chou blanc…

Après la publication, la semaine dernière, d’un très sévère rapport de la Cour des comptes fustigeant l’inefficacité et l’absence de contrôle des aides des collectivités territoriales versées aux entreprises et aux chambres de commerce (lire page 4), l’Humanité livre aujourd’hui une nouvelle pièce accablante au débat public : comment, dans le patronat, les hérauts du libéralisme le plus échevelé utilisent-ils, sous couvert de « développement économique », des fonds publics pour financer leur fonctionnement et nourrir en fait leurs nébuleuses d’organisations. Dans un monde où la loi du silence règne plus que jamais, nous avons recueilli un témoignage qui vient de l’intérieur. Une ex-cadre d’une fédération professionnelle raconte quelques années de travail dans les méandres du patronat : indifférence face à l’absence totale de représentativité, utilisation abusive de fonds publics, déficit absolu de contrôle démocratique, inefficacité économique, etc. « On m’a laissé courir dans le seul but d’obtenir non pas des résultats, mais des subventions », constate-t-elle. Révélations sur un système opaque, mais au fonctionnement si ordinaire.

T. L.

Quand elle découvre, lors d’un énième entretien d’embauche, que son interlocuteur, « vêtu comme une gravure de mode, soixantaine élégante, manières courtoises » et jusque-là protégé par le flou artistique des annonces, représente en fait une fédération patronale, la jeune sociologue, multidiplômée mais au chômage, tombe de sa chaise : non, tout mais pas ça, jamais elle ne travaillera pour les fumeurs de cigares au volant des grosses cylindrées, debout les damnés de la Terre… Elle reste quand même, provoque un brin et prend le parti d’en rire. Au bout du compte, malgré ses piques, même réitérées au deuxième entretien, et « pour je ne sais quelles obscures raisons », insiste-t-elle, elle sera embauchée. À l’automne 1996, Héloïse (1) devient déléguée régionale d’une fédération patronale représentant une cinquantaine de syndicats professionnels et qui compte dans l’Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM), au Groupe des fédérations industrielles (GFI) et au MEDEF.

Bien sûr, elle a du mal, au début : à l’occasion d’une réunion de l’Association des moyennes entreprises patrimoniales (ASMEP), fondée et présidée par Yvon Gattaz, l’exaltation frénétique des vertus, par exemple, du « licencier sans entrave » la révolte… Mais petit à petit elle apprend à construire, comme elle dit, l’équation « moi + représentants patronaux = nous », avec la conviction sincère de la nécessité d’une « alliance des producteurs, incluant les forces vives du salariat et du patronat en vue d’une modernisation démocratique de l’économie et de la société française ».

les PME intéressent peu les organisations patronales

Dans la grande région dont elle a la charge, Héloïse est censée représenter la fédération, les syndicats adhérents et les chefs d’entreprises auprès des collectivités territoriales, notamment afin d’obtenir des subventions publiques pour financer des actions de développement économique. Dans un premier temps, après avoir constaté que 6 % seulement des 2 000 entreprises du secteur implantées dans sa région sont affiliées à la fédération, elle part à la rencontre des industriels, histoire de « connaître ses mandants » et, le cas échéant, de les faire adhérer. « Je voulais mieux connaître le tissu industriel de la région, raconte-t-elle aujourd’hui. Cela me paraissait une priorité : il fallait aller dans les entreprises pour savoir au nom de qui j’allais parler. C’est comme ça, me semblait-il, qu’on pouvait construire notre propre représentativité. Un représentant qui ne connaît pas ses mandants n’est pas représentant. Malgré quelques adhésions prometteuses, on m’a vite expliqué, à la fédération, que les cotisations étaient perçues par les syndicats et non par la fédération, et que, par conséquent, je devais arrêter. » Héloïse élargit le propos. « On parle souvent de l’absence de représentativité des syndicats de salariés, mais jamais de l’absence de représentativité des syndicats de patrons. Or, elle est aussi faible. Elle est calculée par rapport au chiffre d’affaires d’un secteur. Dans ces conditions, les organisations patronales ne sont pas intéressées par les petites et moyennes entreprises. Elles disent : "Nous ne sommes pas un service public, notre mode de financement ne nous permet pas de travailler pour tout le monde !" Les organisations patronales sont des ploutocraties qui paient un bon repas aux chefs d’entreprise histoire de leur faire croire qu’ils sont importants, mais les renvoient bien vite jouer dans leurs boîtes. Les choses sérieuses se passent sans eux. »

brutale mise sur la touche après un congé maternité

Dans le même temps, Héloïse découvre la nébuleuse patronale : fédération et syndicats, mais aussi centre d’études techniques, filiale d’investissement, organismes de formation, structure commerciale de promotion des industries du secteur ou encore « associations de projet », comme celle qui gère une manne de 6 millions d’euros décrochée pour servir à la reconversion des industries liées à l’armement dans sa région et dont Héloïse sera écartée après un congé maternité. « Je n’allais pas me laisser pot-de-fleuriser », lance-t-elle. Elle profite de cette brutale mise sur la touche pour se concentrer sur un projet de site Internet pour les entreprises ressortissant de la fédération, financé par des fonds émanant du ministère de - l’Économie et des Finances. « Il s’agissait de stabiliser et fédérer les multiples structures de ce secteur industriel qui entretenaient entre elles des relations souvent conflictuelles, se souvient-t-elle, en rassemblant dans un portail mutualisé un annuaire des entreprises et de leurs offres, des actualités sur le secteur, une "bourse aux affaires" qui devait permettre aux industriels, souvent âgés, de céder ou transmettre leurs entreprises dans de meilleures conditions, et d’autres services encore destinés à accroître l’attractivité de nos industries. À la fin des années 1990, ce projet très innovant avait été cité par le président de la fédération sur LCI et était considéré au ministère de l’Industrie comme une préfiguration de "l’organisation professionnelle de demain". Après une centaine de réunions, j’avais réussi à convaincre les syndicats professionnels de laisser un peu de côté leur sacro-sainte souveraineté pour mutualiser les informations sur leurs adhérents et les développements informatiques. Les perspectives s’annonçaient prometteuses. »

après le harcèlement, licenciement « pour faute grave » en 2001

Sous l’impulsion décisive d’Héloïse, la fédération patronale reçoit de l’État une première subvention de 430 000 euros pour financer le portail. Deux ans plus tard, le ministère en ajoute une deuxième de 280 000 euros pour financer, sur la base des développements réalisés, le système d’information et d’aide à la décision permettant à la fédération d’optimiser ses processus métiers, de piloter son activité et d’offrir d’autres services destinés à améliorer la productivité des entreprises du secteur. « La contrepartie de ces subventions publiques était que les développements soient pérennes et l’association gérant le projet soit viable économiquement, complète la jeune femme. Mais au long du projet, tout a été fait pour saboter le processus décisionnel, il fallait que l’association ne rapporte jamais d’argent. J’ai dû me battre pour que les fonds publics soient uniquement destinés aux investissements et non aux frais de fonctionnement, lorsque j’ai découvert par hasard que la fédération appliquait ses tarifs les plus élevés pour la location du matériel ou la reprographie. Les organisations professionnelles sont peuplées de grands libéraux qui ne financent leurs projets que sur fonds publics et qui s’empressent de les utiliser pour payer les frais de fonctionnement. Si prompts à réclamer toujours plus d’exonérations, ils se comportent comme des rapaces dès qu’ils sont en situation de taxer… Le secrétaire général m’a dit un jour que, si les syndicats disparaissaient, ça ne le dérangerait pas, car cela lui permettrait de louer les bureaux au prix du marché et de gagner plus d’argent. C’est dire le haut sens de l’intérêt général des entreprises et des syndicats qui règne dans cette fédération - patronale… »

Après une série de péripéties plus malheureuses les unes que les autres, qu’elle qualifie de « cas d’école de harcèlement », Héloïse est licenciée « pour faute grave » en 2001 : exaspérée de voir son patient travail piétiné une fois de plus, elle n’a pas pu s’empêcher d’envoyer une « lettre de licenciement » à son supérieur hiérarchique. Dès lors, c’était elle ou lui, et ce fut elle. Aujourd’hui, le portail vivote sous une forme largement réduite et le système d’information et d’aide à la décision de la fédération n’a manifestement pas vu le jour. « Au lieu de développer des outils facilitant la constitution d’offres globales permettant à plusieurs entreprises de concourir aux appels d’offres auxquels elles ne peuvent répondre seules, au lieu de permettre à cette fédération d’améliorer son positionnement stratégique et sa productivité, l’argent public a été utilisé pour financer deux fois la même chose avec un périmètre des plus restreints », regrette Héloïse.

l’histoire relatée dans un manuscrit, Aujourd’hui en quête d’éditeur

Mais ça n’est pas tout : en 2004, la jeune femme, qui a retrouvé du travail, tombe sur l’appel d’offres d’une chambre de commerce et de l’industrie proposant de développer pour le même secteur industriel en région parisienne ce qui l’avait déjà été pour la fédération… « Les cofinanceurs du projet n’ont même pas vérifié si le ministère de l’Industrie dont ils dépendent avait déjà subventionné un projet analogue. L’absence totale de contrôle des fonds publics attribués aux organisations professionnelles favorise le parasitisme. Profitant des failles de la décentralisation, les organisations patronales multiplient les structures bidons pour capter des fonds publics qui ne reviennent pas forcément aux entreprises. Les corps de contrôle de l’État ne font pas leur travail, déplore-t-elle. Ils n’en ont pas la volonté, ou ils ont peur : « Ne mentionnez pas mon nom », m’a lancé un jour un agent de la répression des fraudes. Le ministre de l’Économie était alors Francis Mer, l’ancien vice-président du MEDEF. « Vous pensez bien qu’il ne fera rien contre une fédération patronale, m’avait-il dit. Je risque pour ma part de gros ennuis si l’on apprend la teneur de nos échanges. » Quand un policier commet une bavure, n’importe quel citoyen peut saisir directement l’IGPN. Par contre, dès qu’il s’agit de l’argent public, le citoyen est dépossédé de tout pouvoir de contrôle. On est dans une culture de la défaillance du politique. Depuis des décennies, les entreprises françaises sont pénalisées par leur positionnement intermédiaire et la faiblesse de leurs exportations, nous répète-t-on toujours. Pourtant, des milliards sont consacrés chaque année pour y remédier. Qui gère cet argent et pour quel résultat ? Combien gèrent les chambres consulaires présidées par les chefs d’entreprise, les organisations patronales et leur myriade d’associations de promotion et de développement ? Je parle aujourd’hui parce que ce déficit démocratique et ces carences de l’État de droit se traduisent par une grande inefficacité économique. Combien cette gabegie coûte-t-elle de points de croissance ? »

Aujourd’hui, pour combattre ses illusions perdues sur les « forces vives » du patronat, Héloïse a choisi de relater son histoire dans un manuscrit en quête d’éditeur. Le titre claque : Des vampires chez les patrons. « Ce que je veux à présent ? Une réforme des organisations patronales, auxquelles il faut imposer la transparence de leurs comptes et une obligation de résultats, une refonte de l’action publique notamment en matière de développement économique, et un renforcement du contrôle démocratique de l’utilisation des fonds publics. » Héloïse observe les atermoiements judiciaires dans l’affaire UIMM non sans inquiétude, mais avec la volonté de se battre pour une société plus transparente, plus juste et plus efficace.

(1) Le prénom a été changé.

Thomas Lemahieu

6 décembre 2007

J'ai failli rater ça - épisode 1

Beau titre n'est-ce pas ?

Le Charançon libéré m'a appris (avec retard) que Florent Pagny sortait un album de chansons de Brel. Je suis moi aussi consterné que le chanteur de "la liberté de voler" * reprenne sans vergogne les titres de cet homme remarquable.

Juste la fin de son post :

Après tout, Pagny reprenant Brel, c'est un peu comme Sarkozy citant Jaurès.

Ou Ségolène se réclamant du socialisme.

Non ?

Si.

* Ah si, note nécessaire :
Le chanteur Florent Pagny a été condamné jeudi 27/01/05 à 15.000 euros d'amende pour fraude fiscale par la cour d'appel de Versailles.

Elle s'est montrée plus clémente que le tribunal correctionnel de Versailles qui, l'an dernier, l'avait condamné en première instance à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 15.000 euros d'amende. Lors de l'audience du 9 décembre, l'avocat général de la cour d'appel avait requis contre lui 8 mois de prison avec sursis et 25.000 euros d'amende.
Ni Florent Pagny ni Pascal Nègre, PDG d'Universal Music, n'ont assisté à l'audience.
Le chanteur était poursuivi pour ne pas avoir déclaré ni payé de TVA pour l'année 1997, pour un montant de près de 48.000 euros, d'avoir minoré de plus de 540.000 euros ses revenus des années 1996 à 1997 et d'avoir détourné des objets qui devaient être saisis pour payer un important arriéré d'impôts. Mais surtout, l'administration fiscale affirmait qu'une somme d'un million d'euros versée début 1996 par sa maison de disques n'était pas un prêt, comme il l'affirmait, mais une avance sur recettes qui aurait du être soumise à l'impôt. Comme le tribunal correctionnel, la cour d'appel a estimé qu'il s'agissait bien d'un prêt et a relaxé le chanteur de ce délit. Pascal Nègre, poursuivi pour "complicité de fraude fiscale", a vu sa relaxe de première instance confirmée.

30 novembre 2007

Maîtriser les dossiers

Combien de fois pendant la campagne électorale du printemps ces messieurs de l'UMP ont-ils martelé que "eux maîtrisaient leurs dossiers". Un article intéressant du blog En attendant H5N1 (ici) m'a conduit à la Wikipédia.

M. Sarkozy, vous êtes incompétent. Il suffit de lire la Wikipédia pour trouver comment combler le déficit de la Sécurité sociale.

Extraits de la Wikipédia :

Le gouvernement tablait en septembre 2006, sur un « trou » de 8 milliards d'euros pour 2007 dans son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) présenté par le ministre de la santé, Xavier Bertrand.

Mais le 23 septembre 2007 la Commission des comptes de la Sécurité sociale (CCSS) prévoit un déficit de 11,7 miliards d'euros pour la seule année 2007.

Cette dégradation est liée aux déficits de :

  • la branche « maladie » qui montrerait un déficit de 6,2 milliards d'euros pour 2007,après 5,9 milliards d'euros en 2006.
  • la branche « vieillesse », dont le déficit 4,6 milliards d'euros en 2007 connait une forte dégradation, (1,9 milliard d'euros en 2006), alors que le gouvernement ne prévoyait un déficit que de 3,5 milliards.
  • la branche « famille » réduirait son déficit: 500 millions d'euros en 2007, contre 900 millions d'euros en 2006.
  • la branche « accidents du travail - maladies professionnelles » serait en déficit de 400 millions d'euros en 2007, après 100 millions d'euros en 2006.
[...]

Par ailleurs, l'analyse doit également intégrer le coût des niches sociales. On appelle niches sociales les dispositifs dérogatoires : exonérations, abattements ...de cotisations sociales. Selon la commission des finances, les pertes de recettes correspondantes avoisinent 50 milliards d’euros en 2007 :

- 20 milliards d’allégements généraux de cotisations patronales,

- 5,5 milliards d’allégements ciblés de cotisations patronales (contrats aidés, zones franches, activités comme les restaurateurs, cafés..)

- 12 milliards d’exonérations au titre des compléments de rémunération (intéressement, participation ...mais soumis à la CSG )

- 7,5 milliards au titre des taux réduits de CSG (revenus de remplacement).

En 2007 le gouvernement doit présenter un bilan détaillé des différents dispositifs d’exonération de cotisations sociales dans le but de chiffrer les pertes de recettes pour l’Etat et la sécurité sociale.

Au pire, M. Sarkozy, faites lire la Wikipédia à Xavier Bertrand, et faites-le travailler !

28 novembre 2007

Vérité

Ce matin, mon PC professionnel tombe en rade. Petit passage dans le local du support, où je laisse la bête ("c'est marrant, ces Thinkpad, ils tombent tous en rade juste après la fin de la garantie"...) et où je surprends une superbe discussion digne d'un comptoir sur les "émeutes" de Villiers le Bel. D'un côté, un technicien qui dit que les jeunes, en général, "ont la haine de la police", de l'autre son chef qui dit que "dans ces banlieues, c'est les trafiquants en tout genre qui sont gênés par la présence de la police"...

En tout cas, si on en croit "Le Monde", la vérité est encore sérieusement tordue...
Je cite :
Une vidéo amateur contredit l'une des affirmations de l'inspection générale de la police nationale (IGPN) sur l'accident entre un véhicule de police et une mini-moto, dimanche 25 novembre à Villiers-le-Bel, qui est à l'origine des deux nuits d'émeutes.

Selon l'IGPN, chargée d'enquêter sur les circonstances de la collision, les images parues dans la presse montrant le véhicule avec l'avant défoncé et le pare-brise étoilé ne traduisaient pas la violence du choc mais s'expliquaient par des dégradations commises à coup de barres de fer après l'accident.

Cet élément est un des arguments avancés par la police (Le Monde du 28 novembre) pour appuyer la thèse d'une voiture circulant à faible allure et percutée par la mini-moto à l'avant-gauche.

La vidéo, que Le Monde a pu visionner une première fois dimanche 25 novembre, vers 20 h 30, puis à nouveau, en détail, mardi 27 novembre, met à mal cette hypothèse.

Les images tournées quelques minutes après l'accident montrent un véhicule sérieusement endommagé, ce qui correspond aux photos publiées dans la presse. Elles vont dans le même sens que les déclarations de témoins qui disent avoir protégé le véhicule de toute exaction pour faciliter l'enquête.

L'auteur du film, que nous avons rencontré, souhaite rester anonyme. Désireux de faire la lumière sur l'accident, il a néanmoins transmis le document à Yassine Belattar, animateur sur la radio Générations 88.2, proche des familles des victimes, qui nous a autorisé à le copier pour pouvoir l'analyser.

Le cinéaste amateur dit avoir été averti "quelques minutes après les faits". Il est aussitôt descendu de son appartement situé à proximité immédiate des lieux. Il dit avoir commencé à filmer "très peu de temps" après l'accident, signalé aux pompiers à 17 heures, selon l'horaire communiqué par la procureure de Pontoise, Marie-Thérèse de Givry. Il dit avoir commencé à filmer entre 17 h 15 et 17 h 20.

La vidéo, de qualité correcte, montre des habitants qui regardent les pompiers en intervention. Ces derniers prodiguent des massages cardiaques aux deux victimes. Des policiers sont présents.

Après quelques minutes, on voit arriver un véhicule du SMUR de Gonesse. Or, selon le SAMU du Val-d'Oise, averti de l'accident à 17 h 03, le camion d'intervention médicale est parti à 17 h 08 de l'hôpital de Gonesse qui se trouve à 5 kilomètres du lieu de l'accident, soit à 10 minutes environ en respectant les vitesses maximales. Selon nos calculs, le SMUR serait donc arrivé vers 17 h 18.

A cet instant, la position du véhicule, à cheval sur la chaussée et sur le trottoir, correspond très exactement à celle observée sur les photos de presse. La vidéo, qui montre le véhicule à de nombreuses reprises et sous plusieurs angles, permet de constater très clairement que le véhicule se trouve dans le même état que sur les premières photos publiées.

Dans les deux cas, le capot, tordu, remonte sur la partie droite, le pare-brise avant est étoilé et enfoncé vers l'intérieur du véhicule, le pare-chocs avant est arraché, ainsi que le phare avant-droit.

LE POMPIER CONFIRME SA VERSION

Reste l'hypothèse de dégradations commises entre le moment de l'accident et le début de la vidéo. Or, les policiers affirment que les victimes n'ont jamais été laissées seules : présents sur place, ils auraient donc signalé d'éventuelles dégradations sur leur véhicule, ce qu'ils n'ont pas fait. Des dégradations survenues à ce moment supposeraient aussi que des jeunes se soient munis de barres de fer dans ce laps de temps et qu'ils s'en soient pris à la voiture alors que les deux adolescents gisaient au sol à proximité.

La vidéo montre aussi que les secours se déroulent dans un contexte relativement calme, au moins pendant la première partie. La tension semble monter vers la fin du film mais ne se traduit pas par des actes de violence.

Interrogés par Le Monde, la police et le ministère de l'intérieur maintiennent la version de l'IGPN selon laquelle, "probablement", le véhicule de police a été volontairement dégradé après l'accident. L'enquête ne cite pas de témoins directs de ces coups éventuels portés contre la voiture, mais s'appuie notamment sur le témoignage d'un major-pompier de Villiers-le-Bel, le premier responsable à être intervenu sur les lieux de l'accident.

Ce dernier a été entendu lundi soir par la police. Joint par Le Monde, il n'a pas souhaité donner son nom mais réitère sa déposition : "La première réflexion que je me suis faite quand j'ai vu les photos de la voiture de police parues dans la presse, c'est qu'elle n'était pas aussi dégradée quand je suis intervenu. Elle n'était pas dans l'état que j'ai vu sur ces photos. Le capot était certes abîmé, le pare-brise et la calandre gauche aussi mais du côté droit, ça tenait encore".

Le sapeur-pompier insiste : "Le véhicule ne ressemblait pas aux images, ça n'avait rien à voir. Quand je les ai vues, j'ai été choqué". L'expert technique mandaté pour déterminer le point exact de l'impact, lui, n'a pas encore rendu ses conclusions.

Luc Bronner et Isabelle Mandraud
Ce n'est certes pas ainsi que l'on réconciliera la jeunesse avec ce qui est devenu la milice du MEDEF.

27 novembre 2007

Avec Chirac, en prison !

Oui je suis pour la rupture, moi aussi. Je suis contre les régimes spéciaux, surtout en ce qui concerne la justice. Deux informations glânées chez Sébastien Fontenelle.

1. La jurisprudence Gautier-Sauvagnac [ici]

Désormais, les citoyens peuvent s'appuyer sur le traitement réservé à M. G. S. pour planifier eux-mêmes leurs entretiens avec l'autorité judiciaire.

2. La nécessité de ne pas attendre la fin de son mandat pour mettre en examen, juger, et incarcérer M. de Petit Botcha.
Les faits accablants sont narrés ici. J'en reprends l'essentiel ci-après.

Big Sarko Is Watching You (Sauf Si Tu T'Appelles Denis Gautier-Sauvagnac, Auquel Cas Big Sarko Is Watching Ailleurs)

(Je vous épargne la photo)


Ca fait 202 jours que Sarkozy est au(x) pouvoir(s), et dorénavant le culte halluciné de sa personnalité se donne sans complexe pour ce qu'il est: "Nicolas Sarkozy peut tout faire" (1), nous explique-t-on à la "faveur" de son voyage en Chine, où Rama Yade, secrétaire d'Etat aux droits de l'homme, ne l'accompagne pas (2).

"Le président n'a pas besoin de Rama pour parler des droits de l'homme, pas plus qu'il n'a besoin de Barnier pour parler d'agriculture ou de Lagarde pour parler d'économie", assure David Martinon, porte-parole de l'Elysée.

Le chef de l'Etat n'a que faire, en somme, d'un gouvernement dont les ministres ne lui sont d'aucune espèce d'utilité.

Omnipotent, omniscient, le chef de l'Etat est quelque chose comme un Big Sarko survitaminé qui sait tout et peut tout.

C'est son porte-parole qui l'affirme désormais à haute et intelligible voix, sans que nul(le) ne s'offusque vraiment de cet ahurissant délire: il est vrai qu'une respectueuse retenue semble être la règle, sur les sujets qui pourraient affaiblir le culte halluciné de la personnalité de Sarkozy.

On sait, par exemple, "Marianne" le révèle ce matin mais l'information est connue depuis le début de l'après-midi d'hier, que, dans l'affaire de l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), Sarkozy a été informé dès 2004, "quand il était ministre des Finances", des "retraits suspects effectués par Denis Gautier-Sauvagnac" dans les caisses de cette organisation patronale (3).

Retraits qui "se montaient, selon "Marianne", à 700.000 euros en 2000, 900.000 euros en 2001, 700.000 euros en 2002, 600.000 euros en 2003 et 300.000 euros de janvier à mai 2004".

(Voilà des sommes (en liquide) qui nous changent agréablement, n'est-ce pas, des minables salaires des privilégié(e)s de la fonction publique...)

Il faut le répéter lentement, pour bien se pénétrer de ce que ça induit: Sarkozy, l'omnipotent, l'omniscient, a été informé dès 2004, par "le service d'enquête du ministère des Finances", d'une affaire où "Denis Gautier-Sauvagnac (...) se promenait régulièrement avec des mallettes d'argent liquide provenant d'une mystérieuse caisse noire dotée de plus de 600 millions, alors que le budget annuel du MEDEF ne dépasse pas 32 millions d'euros" (4).

Et qu'a-t-il fait, à ce moment-là?

Qu'a-t-il fait, cet homme qui "peut tout faire", et qui nous a promis, à mainte et mainte reprise, que son règne serait celui, aussi, de la "transparence"?

Il a "empêché la justice de travailler sur la caisse noire de l'UIMM", explique "Marianne".

Il a tout simplement "voulu enterrer l'affaire".

Hein???

Quoi???

Le même crâne chef de l'Etat, qui régulièrement réclame pour la gueusaille (surtout quand elle n'a pas de papiers) d'impitoyables châtiments, a regardé ailleurs, quand on lui a signalé que des patrons faisaient grave du black et se baladaient avec des liasses de 900.000 euros?

Voilà exactement ce que j'appelle une info sensationnelle.

Une info qui, par conséquent, devrait faire sensation, et être partout reprise, partout affichée, partout proclamée.

Or: dans la presse du jour?

Pas un mot.

Pas un entrefilet.

Rien. [...]

(1) "Le Monde", samedi 24 novembre 2007.
(2) Car, n'est-ce pas: "L'Elysée espère conclure au cours de cette visite de trois jours d'importants contrats commerciaux" - et le régime qui vient de passer huit jours à nous répéter (par la voix notamment de Valérie Pécresse et de ses laquais de la presse) que les mouvements sociaux étaient manipulés par "l'extrême gauche" n'a aucune intention de fâcher les "communistes" chinois en les importunant avec un truc aussi bien-pensant que les droits de l'homme.
(3) "UIMM : le cabinet de Sarkozy a été informé en 2004", Nouvelobs.com, 23 novembre 2007, 16 heures 19.
(4) "Marianne", samedi 24 novembre 2007.

Comment dire merci à ses électeurs

Élu essentiellement par les électeurs de plus de 70 ans, M. de Petit Botcha les remercie à sa façon. Comme nous l'explique Olivier :
Voilà donc que l'an prochain, les personnes âgées de plus de 60 ans et au revenu fiscal inférieur à 9 437 euros, ainsi que celles de plus de 65 ans et non imposables, qui étaient jusqu'alors exonérées de la redevance audiovisuelle, devront désormais acquitter ses 118 euros annuels (en augmentation de 2 euros l'année prochaine). Sont concernés 780 000 foyers et 850 000 personnes, qui rapporteront donc 92 millions d'euros. Quel cynisme d'ainsi frapper ceux qui subsistent à peine avec une retraite famélique ! Et quelle ingratitude de la part de Sarkozy, quand on sait la part prépondérante prise par le "vote vieux" dans son élection...
En 2008, pourtant, il y aura des élections... d'ailleurs, on s'y prépare comme on peut, à l'UMP, en cartonnant des jeunes à moto pour déclencher de nouvelles émeutes ? Attention quand même au vote FN...

21 novembre 2007

Crise

Durs moments dans la vie que ces derniers temps. Changement de domicile, avec des travaux à réaliser beaucoup plus conséquents que prévus. Accident de l'être aimée, meurtrie dans sa chair. Déstabilisation des enfants. Difficultés au travail. Je ne suis pas sûr d'être d'humeur égale dans de telles circonstances...

Et j'ai l'impression de me heurter à des murs d'incompréhension. Je n'ai pas envie de blesser qui que ce soit, je n'ai pas envie de rentrer énervé à la maison où la tension est trop forte. Je tourne en rond.

13 novembre 2007

Légitime, légal, normal

Malgré le bourrage de crâne indigne d'une presse qui devrait avoir honte (par exemple, Metro daté d'aujourd'hui), il convient de répéter un certain nombre de choses sur la grève annoncée demain à la SNCF.

Le droit de grève est inscrit dans notre Constitution. Je m'étonnerai toujours du laxisme du système juridique contre les remises en cause de celle-ci.

Cette grève est donc légale.

Elle est aussi légitime, car elle remet en cause un équilibre entre pénibilité et compensation de cette pénibilité. Si demain votre patron vous dit : finalement, on baisse les salaires de 25% mais vous continuez à travailler autant, quelle sera votre réaction ?

C'est normal que les "usagers" se sentent gênés par cette grève. Ce qui serait normal aussi, c'est qu'ils ne tombent pas dans le panneau des manipulateurs qui parlent de "prise en otage" et autres joyeusetés, de leur douillet appartement des beaux quartiers (dont ils ne sortent qu'en voiture)...

30 octobre 2007

Guy Môquet, le poème

Mieux que la fameuse lettre, ce poème saisi sur le jeune communiste le jour de son arrestation. Un appel à la jeunesse d'aujourd'hui ?

« Parmi ceux qui sont en prison
Se trouvent nos 3 camarades
Berselli, Planquette et Simon
Qui vont passer des jours maussades

Vous êtes tous trois enfermés
Mais patience, prenez courage
Vous serez bientôt libérés
Par tous vos frères d’esclavage

Les traîtres de notre pays
Ces agents du capitalisme
Nous les chasserons hors d’ici
Pour instaurer le socialisme

Main dans la main Révolution
Pour que vainque le communisme
Pour vous sortir de la prison
Pour tuer le capitalisme

Ils se sont sacrifiés pour nous
Par leur action libératrice


15 octobre 2007

Nazi (2)

Toujours la tête sous l'eau, mais quand même. Le dernier commentaire sur le post précédent (analogie avec le pétainisme) m'a fait réfléchir, persister et signer. L'idéologie de ce gouvernement n'est pas pétainiste, elle est plus proche du nazisme, avec son instrumentalisation du test génétique. Il ne reste à espérer que, comme le "Reich de mille ans", celui de Nicolae Sarkozescu ne dure que 5 ans.

20 septembre 2007

Nazi

Je suis surchargé de travail, au boulot, à la maison, avec un début d'angine. Ce blog est loin d'être prioritaire. Mais je n'ai pas envie de rire. Cette nuit, la "représentation nationale" a voté sans sourciller un texte digne du régime de Vichy. Avec le verrouillage des médias et bientôt la généralisation de la précarisation du travail, nous entrons dans un régime que je qualifie sans aucune hésitation de nazi. Les résistants (et même les fusillés non résistants comme Guy Môquet) doivent se retourner dans leur tombe (ceux qui sont encore en vie sont suffisamment lucides, je l'espère, pour avoir déjà repris le maquis).

3 septembre 2007

Légionnaire

Avec le verrouillage des médias par le pouvoir, il faut savoir trouver d'autres sources d'information. Rue89 regorge d'article d'intérêt, notamment celui-ci de Pierre Servenay sur feu Pierre Messmer :

A chaque disparition, la coutume veut que l'on oublie les zones d'ombre de la vie d'un homme. Pourtant, lorsque celle-ci fut celle, très publique, d'un "grand serviteur de l'Etat", il est nécessaire de ne rien omettre. Le récit de la vie de Pierre Messmer, décédé mercredi à 91 ans, n'échappe pas à la règle. "Soldat" pour La Tribune, "Légionnaire" du gaullisme pour Le Figaro ou encore un "homme de combat" pour Le Monde. Il y a, dans toutes ces expressions, la marque de ce que fut Pierre Messmer, toute sa vie, avec résolution: un soldat de métier. Et ce, dans une période, la guerre froide, qui supposait parfois de mettre de côté certaines convictions humanistes.

Tirailleur, légionnaire, administrateur colonial...

Alsacien d'origine, Pierre Messmer fut soldat bien avant la guerre. Dès 1937, jeune diplômé de l'Ecole nationale de la France d'Outre-mer, il est nommé sous-lieutenant du 12e Régiment de Tirailleurs sénégalais. Quand survient la déroute de l'hiver 1939-40, il fait un choix courageux et minoritaire à l'époque, celui de Londres où il s'engage dans la 13e Demi-brigade de Légion étrangère. Cette unité occupe une place particulière dans la légende gaulliste. Elle est la première à incarner l'espoir de la reconquête contre les troupes du IIIe Reich en partant d'Afrique. Sénégal, Gabon, Libye, Tunisie, Londres à nouveau puis la Normandie et Paris où le capitaine Messmer entre en vainqueur le 25 août 1944.

La suite est moins connue. Promu commandant en janvier 1945, le jeune Messmer -il a alors 29 ans- choisit le front indochinois pour continuer le combat. Le 27 août 1945, il est parachuté sur le Tonkin et immédiatement capturé par le Viet-Minh. Il s'échappe au bout de deux mois de captivité. Une expérience traumatisante, après laquelle il retrouve le chemin de l'administration coloniale. Il passe alors cinq ans en Indochine, à Hanoï dans les arcanes du Haut commissariat. La suite figure dans toutes les biographies, comme celle établie par La Tribune:

"Administrateur du cercle de l'Adrar mauritanien (1950-1952), gouverneur de la Mauritanie (1952-1954), de la Côte d'Ivoire (1954-1956), directeur de cabinet du ministre de la France d'Outre-mer Gaston Defferre (1956), Haut commissaire de la République au Cameroun (1956-1958), en Afrique équatoriale (1958) et en Afrique occidentale française (1958-1959), Pierre Messmer joue un rôle primordial dans le processus de décolonisation douce qui voit la France se séparer sans drame de ses colonies africaines."

Au Cameroun, la première opération de pacification en Afrique sub-saharienne

Je ne suis pas sûr que l'on puisse parler de "processus de décolonisation douce" en évoquant le passage de Pierre Messmer au Cameroun. Les bribes d'histoire filtrant depuis les pays Bassa et Bamiléké nous disent même exactement le contraire. Depuis 1955, la France fait face dans ce territoire administré sous tutelle de l'ONU à une rébellion de l'Union des populations du Cameroun (UPC) emmenée par Ruben Um Nyobé, fils de sorcier Bassa et syndicaliste proche des communistes. Officiellement interdite depuis un décret de juillet 1955, l'UPC entretient un climat de guérilla dans le pays. Attentats, actions de sabotage, assassinats... Dans la nuit du 18 au 19 décembre 1956, pour appuyer son mot d’ordre de boycottage aux élections de l’Assemblée territoriale, elle opère une série d’attentats qui coûtent la vie à 96 "valets du colonialisme". En Sanaga maritime, les opérations de vote sont suspendues, tandis que 80% des électeurs s'abstiennent à Douala.

Le Haut-commissaire Messmer va alors changer de stratégie. Au dialogue politique, il substitue une vaste manoeuvre contre-insurrectionnelle, directement inspirée de la doctrine de la "guerre révolutionnaire" théorisée en Indochine et appliquée en Algérie. A Paris, il rend visite au général de Gaulle, qui est alors en pleine traversée du désert, dans son bureau de la rue de Solférino:

"Je lui expose la situation au Cameroun, écrit Messmer dans ses mémoires, et la politique arrêtée par le gouvernement sur ma proposition. Il m’écoute attentivement et me répond par des généralités car il s’interdit alors de se prononcer sur l’action gouvernementale. Mais je comprends que, sur ce point précis, il n’y est pas hostile."

Quelle est cette nouvelle politique? Réponse de l’intéressé:

"Désormais, ma stratégie sera simple: ayant réussi à contenir la révolte de l’UPC dans son berceau du pays bassa, je l’y étoufferai. Et j’y parviendrai, remportant l’un des deux succès français de l’après-guerre contre des insurrections outre-mer (l’autre étant Madagascar)."

Pour mémoire, rappelons que l'insurrection de 1947 fit environ 40 000 morts.

Quadrillage et recensement

La suite? Rien moins que la première opération de pacification lancée en Afrique sub-saharienne, selon les principes de la "guerre révolutionnaire". Les manoeuvres sont racontées -un peu- par Messmer, mais surtout par un mémoire du commandant Jean Le Guillou, stagiaire de la 73e promotion de l'Ecole supérieure de guerre, "Une pacification réussie: la réduction de la rébellion upéciste en Sanaga maritime (Cameroun 1957-1958)." Le 9 décembre 1957 est créée la Zone de pacification du Cameroun (Zopac): 7 000 km2 contrôlés par sept compagnies d'infanterie qui vont quadriller l'espace. "Ce découpage, écrit le commandant Le Guillou, s’adapte à peu près à celui des rebelles tel qu’on le connaît alors et se conforme naturellement à l’ossature du terrain."

Le tout est articulé à un puissant appareil de renseignement mixte civilo-militaire, mêlant policiers, gendarmes et soldats, français et camerounais. Sans oublier des patrouilles de bons citoyens. L’état-major mixte a donc prévu, dans un premier temps, de séparer l’eau du poisson. Autrement dit, d’éloigner la population des principaux foyers de la rébellion. Pour cela, les soldats regroupent tous les habitants de la région autour des axes routiers dont l’armée est sûre de garder le contrôle. Ces villages sont gardés, entourés de palissades avec un mirador et pourvus d’une équipe de surveillance chargée d’alerter la troupe en cas d’attaque nocturne. A l’entrée, une liste des habitants recensés, quartier par quartier, foyer par foyer, liste tenue par les chefs traditionnels. Régulièrement, de nuit comme de jour, l’autorité fait l’appel des habitants, exactement comme dans n’importe quel camp de prisonniers. Dans certains villages, ils reçoivent une carte de recensement avec photographie qui sert à la fois de carte d’identité et de permis de circulation.

Traque et ralliement

A partir du 1er avril 1958, le remède devient une cure de choc. Le but: "Pourchasser inlassablement les formations rebelles, tandis qu’une action particulière de propagande incitera les maquisards à se rallier."
La traque aux rebelles dans la forêt se déroule comme une partie de chasse: quatre à six hommes, un officier et un pisteur local. L'objectif consiste à désorganiser les liaisons de l'ennemi et surtout à créer un climat d'insécurité qui incite les séparatistes à abandonner la lutte armée. Dès le 7 juin 1958, le général Nyobé Pandjock, chef militaire de l'UPC, est abattu au "cours d’un raid monté sur renseignement". Le 13 septembre, Ruben Um Nyobé est victime d’une opération similaire, son corps est immédiatement coulé dans un bloc de béton pour éviter d'avoir un martyr. Commence alors la phase de "ralliement": journal destiné au milieux ruraux, "agents de propagande" dans les villages et séances de rééducation concoctées par les officiers de l'action psychologique.

Combien de victimes derrière cette ultime réaction du pouvoir colonial? Dans un témoignage non démenti, Max Bardet ("OK Cargo!", Editions Grasset, 1988), ancien pilote d’hélicoptère français présent au Cameroun entre 1962 et 1964, avance comme bilan des bombardements au napalm effectués cette fois-ci en pays Bamiléké le chiffre de 300 000 à 400 000 morts. Tous les Camerounais savent que pendant les années 1960 et 1970, on exposait sur les marchés de la région les têtes coupées des maquisards de l’UPC. L'histoire reste donc à écrire.

Pierre Messmer ne verra pas la fin des massacres. Dès l'automne 1958, il a été promu à Brazzaville, Haut-commissaire pour l'Afrique équatoriale française. Il continue son ascension vers les sommets du pouvoir: ministre des Armées (neuf ans, un record sous la Ve République), Premier ministre (deux ans) et enfin, l'immortalité de l'Académie française.

La pacification camerounaise fut une politique d'Etat, et Messmer n'en est certainement pas le seul architecte. Mais si l'on évoque la figure de l'autorité, n'oublions pas sa face la plus dure, celle de l'exercice de la violence légitime de l'Etat. Violence dont tout homme d'Etat doit pouvoir un jour rendre compte devant l'Histoire.

1 septembre 2007

Le retour

Pas facile de rentrer de vacances. Surtout quand on a eu la chance d'être sans connexion internet pendant 3 belles semaines. Piscine, balades, lecture, câlins, baby foot, etc.

Et puis rien n'a changé. L'ascenseur du boulot est toujours en panne (5 étages, c'est bon pour mon coeur), le démagogue-président continue de distiller ses salades plusieurs fois par jour, et tout le monde a quand même été content de retrouver la maison.

1 août 2007

Africain

Après son discours douteux de Dakar, l'impression générale est que M. de Petit Botcha est un incompris. C'est certainement le plus Africain de nos présidents... La preuve ? Dans le blog Sarkofrance...

Sarkozy : une présidence qui rappelle certaines dictatures africaines


Une analyse de Nettali: "La politique de communication de la présidence Sarkozy rappelle celle des dictatures africaines des années 1970 et 1980, assises sur la personnification des chefs d’État en qui les peuples africains croyaient. Et pourtant..."
"Les Congolais par exemple, font souvent le parallèle entre le pouvoir de Sarkozy et celui de feu Mobutu, tout aussi omniprésent et dont les moindres déplacements, moindres discours, étaient rapportés quotidiennement dans les journaux."


Les élections françaises furent très suivies, compte tenu de l’histoire entre ces pays et la France. Cette dernière représentait pour eux, un secours et un protecteur."
(...) Bien que la candidate socialiste fut de loin la préférée de ces populations, la réalité est devenue tout autre depuis l’intronisation de monsieur Sarkozy à la présidence de la République française. Le personnage fascine les Africains et rappelle les années de gloire des feus présidents tels Mobutu au Zaïre, Eyadema au Togo, Micombero au Burundi, Habyarimana au Rwanda et autres dictateurs toujours en vie comme Bongo au Gabon, Paul Biya au Cameroun, Sassou Ngueeso au Congo, Kagame au Rwanda, devenus, dès lors, démocrates."
(...) "Les Congolais par exemple, font souvent le parallèle entre le pouvoir de Sarkozy et celui de feu Mobutu, tout aussi omniprésent et dont les moindres déplacements, moindres discours, étaient rapportés quotidiennement dans les journaux. Au début de chaque journal télevisé, il apparaissait sur le petit écran de la télévison zaïroise. Mobutu était considéré par la majorité de la population comme la personne la plus apte et capable de tenir et conduire ce Congo, ex-Zaïre ; sa personne et son image étaient présentes chez tous les Congolais ; il était parvenu à conquérir le subconscient de la majorité de la population ; personne ne pouvait imaginer que Mobutu pouvait être chassé du pouvoir par un petit pays comme le Rwanda ; il était considéré comme un dieu vivant, ou un sauveur venu sur terre. Il pouvait tout et avait tout ce qu’il voulait : les solides opposants de cette période furent récupérés et promus dans le gouvernement, avant d’être salis et rejetés par la suite."

31 juillet 2007

Penser nuit

Excellent article sur le blogue Action républicaine. Ce gouvernement n'est pas composé seulement d'incompétents, mais aussi d'allumés graves...

In extenso.

Dans le style, nous avons aussi: «Travailler plus pour penser moins.» Ces piquants aphorismes peuvent désormais passer pour les nouveaux slogans de la communication du cabinet Sarkozy - pardon, du gouvernement Fillon, quelle étourderie... Après le discours étonnant, pour employer un euphémisme secourable, prononcé le 10 juillet à l’Assemblée nationale par la ministre des Finances à l’occasion de la présentation du projet de loi "Travail, emploi et pouvoir d’achat", l’"International Herald Tribune" (22/07/07) a opportunément relié ses propos à la liturgie du «travailler plus», bourdonnée telle une inlassable antienne par le candidat puis le président Sarkozy.

Dans cette allocution mémorable, qui restera probablement comme un sommet de rhétorique néolibérale, Christine Lagarde a en effet stigmatisé l’utilisation immodérée que nous autres Français ferions de notre néocortex, siège de notre pensée consciente. Le passage en question vaut son pesant de cacahuètes et cervelles grillées : « C’est une vieille habitude nationale : la France est un pays qui pense. Il n’y a guère une idéologie dont nous n’avons fait la théorie. Nous possédons dans nos bibliothèques de quoi discuter pour les siècles à venir. C’est pourquoi j’aimerais vous dire : assez pensé maintenant, retroussons nos manches. »

La première impression est que la ministre a appliqué sa propre exhortation : pour proférer de telles incongruités, elle n’a pas surmené ses connections synaptiques. Selon Bernard-Henri Lévy, « c’est le genre de chose que vous pouvez entendre dans des conversations de café, de la part d’abrutis qui boivent trop »... Mais la perplexité cède ensuite rapidement le pas à l’indignation. Car enfin il ne s’agit justement pas d’une blague de comptoir, ni même d’un badinage off avec des journalistes, mais de l’exposition pesée et préparée, devant les représentants du peuple, de l’idéologie politique présidant à une réforme annoncée comme décisive. Le plus officiellement du monde, le gouvernement professe un renversement total de certaines valeurs fondatrices de « l’identité » française, à laquelle il se prétend pourtant si sensible. Ce qui était en haut se retrouve en bas : être d’un pays qui réfléchit, qui a théorisé sur tous les grands courants de pensée, qui a produit les Lumières et nombre de philosophes parmi les plus importants de l’histoire des idées, dont les bibliothèques publiques sont garnies d’ouvrages qui nous aident à comprendre le monde et notre humaine condition, constitue pour vous comme pour moi un motif de satisfaction et de fierté ?... Eh bien désormais, nous intime la ministre, il nous faut en avoir honte. La quête de sens, la réflexion, le discernement, l’intelligence, doivent être considérés comme les symptômes d’un passé plus poussiéreux que les rayonnages de bibliothèques qu’on est prié de ne plus alimenter en œuvres nouvelles. Pour les philosophes, écrivains, et intellectuels divers, ce sera tantôt le chômage technique ou le recyclage façon Mao...

Pourquoi ? Parce que nous explique ainsi la ministre, en France nous pensons trop pour bien travailler - cette pensée-là étant générée par un cerveau gouvernemental, un des rares encore encouragés à réfléchir avec ceux des ingénieurs R&D, elle n’est pas incluse dans l’anticogito lagardien. Par conséquent, tous ceux qui se retroussant déjà les manches jusqu’à l’omoplate, souhaitent consacrer du temps à d’autres petites choses essentielles au plaisir de vivre - conjoint, enfants, amis, loisirs - sont des fainéants. Tous ceux qui ont cru constater que, pour bien faire son boulot, il fallait se triturer un tant soit peu le chou, sont des rêveurs. Même pour être président de la République, contrairement à ce qu’on pouvait estimer, il n’y a pas besoin de beaucoup penser : « Je ne suis pas un théoricien, je ne suis pas un idéologue, je ne suis pas un intellectuel », se louait notre chef d’État à la télévision le mois dernier, comme le rappelle l’article susnommé du Herald...

Selon quelle étrange logique peut-on proférer qu’il faut arrêter de penser ? Peut-être, au hasard, suivant celle de l’idéologie néolibérale : il serait assurément plus facile de faire croire à une population d’anencéphales que la hausse de la TVA est une mesure sociale, les cadeaux fiscaux aux plus aisés un filon pour relancer la croissance, réduire le chômage et la dette, et tant qu’on y est, que la lune est une peau de veau... L’atrophie de la pensée est au sein même de l’entreprise un redoutable moyen de contrôle. Comme l’expliquait en effet Christophe Dejours, titulaire de la chaire de psychologie du travail au Conservatoire national des arts et métiers, dans la revue Res Publica (août 2004), les nouvelles formes d’organisation du travail et de management se basent sur la concurrence généralisée entre collègues, l’encouragement aux pratiques déloyales, et la rupture des liens de solidarité ; « ce système qui génère la peur chez nombre de travailleurs est aussi à l’origine d’injustice, de harcèlement, de déstabilisation calculée, qui produisent toutes sortes de souffrances ». Mais, pour que le système fonctionne, il lui faut des outils : « Des masses de braves gens sont dans le cadre de la modernité néolibérale invités à apporter leur concours [...] à des actes qui consistent à intimider autrui, à menacer, à faire peur, à mettre au point des « plans sociaux », [...] c’est-à-dire à commettre des actes injustes. » Certains n’y parviennent pas. D’autres, pour parvenir à effectuer « le sale boulot » sans se haïr, mettent au point une stratégie de défense qui a pour effet « d’engourdir la conscience morale, ce qui passe par un rétrécissement - c’est important sinon capital - de la capacité de penser ».

Arrêter de penser, selon Mme Lagarde, permet en outre de travailler davantage. Le problème est qu’un salarié pressuré court plus de risques qu’un adepte de la méditation... Certains en meurent. Dans le contexte préoccupant de l’accroissement des psychopathologies professionnelles sévissant de l’ouvrier au cadre, les rafales de suicides sur le lieu de travail comme chez Renault et PSA - phénomène nouveau de mémoire médicale, suscitent un franc malaise. C’est de fatigue que d’autres salariés décèdent. Ainsi, par exemple, du métallurgiste Rudy Norbert, employé d’une entreprise sous-traitante dans le Nord, dont le sort est révélé par le journaliste Paul Moreira dans son livre Les Nouvelles Censures. Voilà un cas édifiant. Son patron exigeait qu’il puisse être joint en permanence. Il travaillait parfois deux jours d’affilée, la masse illégale des heures supplémentaires étant camouflée en primes. Le 7 mai 2001, il travaille 21 heures de suite. On le rappelle à 2 h 30 la nuit suivante ; à 6 heures du matin, constatant son total épuisement, son chef de chantier lui dit d’aller se reposer quelques minutes dans la voiture de la société. Il s’assoit, pose sa tête contre la vitre et meurt. Il avait 30 ans... Et pendant que certains laissent leur raison et leur peau au boulot, d’autres n’en ont aucun. Mme Lagarde, pour qui il n’existe pas de lien social en dehors du travail (« Le contrat social, aujourd’hui, se décline en contrats de travail »), nie pourtant que le marché du travail soit « un gâteau à partager » entre concitoyens. Il faut dire qu’il est tellement plus rentable, pour une charge de labeur donnée, de payer moins de gens qu’il n’en faudrait...

Il faut lire ce discours en entier. Les envolées lyriques finales sont insurpassables : « Le travail engendre le travail. À l’intérieur de ce cercle vertueux, le pays tournera à plein régime. [...] Travailler plus, et vous multiplierez l’emploi. Dépensez plus, et vous participerez à la croissance. Gagnez plus, et vous augmenterez le pouvoir d’achat ! » Tant pis pour les bécanes humaines qui cassent à force de tourner à plein régime : le salarié jetable se remplace facilement. Travaillez plus, consommez plus, polluez plus. La fuite en avant n’en sera que plus rapide.

De cette facture orwellienne idéale, il n’y aurait donc que la pensée à soustraire... Il convient d’appeler enfin les choses par leur nom : quand un pouvoir politique articule l’affaiblissement de la pensée à l’augmentation du travail, il assume une propension au totalitarisme contre laquelle nous devons rester éveillés - les Nord-Coréens sont-ils par exemple encouragés à réfléchir par leur charismatique leader ?...

La pensée contient des mondes infinis ; elle est le siège de notre humanité, ce qui nous reste quand tout nous a été ôté. Elle ne devrait jamais être soluble dans le travail. Employer ne doit pas devenir synonyme de domestiquer, ni l’argumentation économique marchande dominer toutes les autres dimensions de la délibération politique.

Par Sophie, Agoravox

26 juillet 2007

Lâcheté

En 1940, 99% de pétainistes... en 2007, combien de Sarkozystes. La police ne fait qu'obéir aux ordres, rien n'a été fait sérieusement pour contrôler et réprimer les abus de pouvoir dont elle se rend coupable chaque jour, et de plus en plus encore depuis le 6 mai. Dernier fait édifiant en date, l'agression contre une vendeuse à la sauvette enceinte (mais en situation régulière) dont Libé s'est fait l'écho :
L’Inspection générale des services (IGS), la police des polices, devrait recevoir ce matin les plaintes de deux femmes enceintes brutalisées en pleine rue, par des policiers, mardi dernier, dans le quartier de la Goutte-d’Or à Paris. La première, Josiane, une vendeuse de légumes camerounaise, a été interpellée, frappée, puis placée en garde à vue jusqu’à mercredi midi. La seconde, Louise, venue acheter des légumes, a été seulement témoin de l’arrestation de Josiane, avant de prendre elle aussi un coup de matraque et d’être évacuée par les pompiers. «Je me suis approchée en voyant que les policiers demandaient à cette femme de lui remettre sa marchandise, raconte Louise. Mais ils ont commencé à la brutaliser. Je n’en revenais pas qu’ils la brutalisent comme ça.»
La fin de l’intervention policière a été en partie filmée par un riverain avec son portable (1). Elle n’est pas sans rappeler les dernières opérations d’arrestations de sans-papiers dans le quartier de Belleville, en particulier celle effectuée à la sortie de l’école de la rue Rampal, en mars.
Cette fois, c’est une vendeuse à la sauvette, titulaire d’une carte de séjour de dix ans, qui a été interpellée. Josiane, enceinte de plus de huit mois, a reçu un coup de poing en plein visage, avant d’être emmenée par les policiers et frappée dans la voiture.
La vidéo la montre, allongée par terre, dans l’émotion générale. «Ils m’ont jetée dans la voiture, explique Josiane. Je me suis retrouvée allongée à l’arrière. Le policier est monté sur mon dos, et il me tabassait. Il me donnait des coups sur la tête, de gauche à droite.»
Moulinets. Dans le quartier, plusieurs témoins qui ont vu partir la voiture confirment la scène. «J’ai vu un flic à l’arrière de la voiture, qui semblait assis sur quelqu’un d’allongé, et qui tapait dessus», explique Emmanuel. Alors qu’il tentait de s’interposer, Traore, le mari de Josiane, s’est fait asperger de gaz lacrymogène avec son fils. Choquée du traitement infligée à Josiane, Louise, la seconde femme enceinte, se trouvait à proximité quand les renforts policiers ont entrepris de disperser les témoins. «Les policiers ont fait des moulinets avec leurs matraques, dit Christophe, le mari de Louise. Et ma femme a reçu un coup. Elle a peut-être été touchée par inadvertance, mais le policier n’a rien fait pour lui venir en aide.»
Louise est emmenée par les pompiers à l’hôpital Lariboisière. Elle a un hématome dans le dos, mais son enfant se porte bien. Elle préfère rentrer chez elle, plutôt que de rester en observation. Pendant ce temps-là, au commissariat de la Goutte-d’Or, Josiane, menottée, attend toujours un médecin. On a oublié ses légumes, et on lui reproche désormais un «outrage à dépositaire de la force publique». Les pompiers passent la voir, mais ce sont les policiers qui la conduisent à l’Hôtel-Dieu, aux urgences médico-judiciaires, sous le régime de la garde à vue.
Echographie. Son mari, Traore, s’est présenté au commissariat pour apporter les chaussures de sa femme laissées sur le bitume du marché Dejean. On ne lui donne aucune nouvelle. Il n’en aura que le lendemain par un coup de téléphone de sa femme. Entre-temps, Josiane est conduite dans un autre hôpital pour y faire une échographie. S’il n’y a rien à signaler pour la grossesse, les médecins délivrent quand même à Josiane un «certificat de constatation de lésions», qui mentionne des «cervicalgies aiguës». Josiane a été remise en liberté, mercredi, vers midi, informée que le parquet ne donnait «pas suite» à la procédure.
(1) Sa vidéo a été diffusée par Libération.fr (http://indociles.blogs.liberation.fr)
Ces policiers sont des lâches.

Rien à dire, juste serrer les dents, tenir 5 ans, essayer d'ici là de trouver une opposition crédible et humaniste. Difficile dans une société entièrement vouée à l'argent...

12 juillet 2007

12 juillet

Le dimanche 12 juillet 1789, Camille Desmoulins harangue la foule au
Palais royal à Paris et incite le peuple à prendre les armes.

La politique menée alors dans le royaume de France est en effet de
donner toujours plus de privilèges aux privilégiés, toujours plus de
fortune aux fortunés !

Toute ressemblance...

10 juillet 2007

Ouverture...

De temps en temps, d'excellentes synthèses sont disponibles dans la blogosphère. Ainsi celle-ci, sur la prétendue "ouverture", sur le blog "Crise dans les médias" :

L'"ouverture": un mensonge de Sarkozy validé par les médias

Combien de fois avez-vous entendu le mot « ouverture » depuis le 6 mai 2007 ? Des centaines de fois...

C’est le bourrage de crâne habituel. On répète un mot (ou une séquence filmée diffusée en boucle). Au bout d’un moment, ça fini par rentrer dans les crânes.

L’ouverture donc. Gros mensonge. On ne peut en vouloir à Nicolas Sarkozy de mentir : c’est son métier. En revanche, les médias ne sont pas dans leur rôle: ils devraient décrypter le discours du président de la République et non le reproduire sans recul.

Pourquoi l’ouverture est-elle un mensonge ?

1) Main mise sur le pouvoir

La soi disant ouverture vise à cacher la main mise totale de l’UMP sur tous les leviers du pouvoir : présidence de la République, gouvernement, Assemblée nationale, Sénat. Sans oublier, dans la société, des amitiés nombreuses parmi le patronat (du MEDEF à la CGPME), les médias et certains lobbys.

Bref, ce qui menace la France, c’est un étouffement progressif. L’UMP (seulement 31% au premier tour de la présidentielle) accapare tous les pouvoirs.

2) Démocratie du strapontin

Même si on est bien disposé à l’égard de Nicolas Sarkozy, on est obligé de noter que l’ouverture qu’il propose n’en est pas une.

Ainsi, il a offert une « place » à Fadela Amara. Mais c’est un strapontin. Elle est sous la tutelle de Christine Bouttin, dont tout le monde connaît l’ouverture d’esprit. Avec elle, Fadela aura-t-elle le droit de l'ouvrir?

Bernard Kouchner (photo) a un ministère entier, direz-vous ! Mais les Affaires étrangères sont le domaine réservé du chef de l’Etat. Ré-ser-vé! Ca veut dire pas touche. Donc, Kou-kouch’ panier.

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Jouyet, n’en parlons pas. Puisqu’il dépend de Kou-kouch’ qui dépend du chef de l’Etat, vous avez compris quel sera son degré d'action!

Jean-Marie Bockel dépend aussi de Kou-kouch’. Dites donc, le quai d’Orsay, c’est un nid à d’anciens socialistes ! Sarko veut les avoir à l’œil on dirait.

Voilà. Concrètement, l’ouverture c’est ça. Kouchner aura le droit d’être sur la photo à côté de Sarkozy quand ce dernier ira faire le beau devant Condolizza Rice.

Pour résumer, Sarkozy propose une démocratie du strapontin. Si tu te soumets à lui, tu as droit à un strapontin. Un joli siège éjectable. C'est très facile d'agir en citoyen libre quand on est assis sur un siège éjectable...

3) Dissoudre l'opposition

L'ouverture est un procédé bien peu démocratique.

La démocratie suppose qu'il y ait débat. Ce débat est censé se dérouler à l'Assemblée nationale.

En débauchant des membres de l'opposition, Nicolas Sarkozy sous-entend que l'opposition ne sert à rien. En effet, s'ils acceptent de travailler avec lui, c'est qu'ils sont d'accord sur l'essentiel. Et c'est que le PS est creux et vide, sans idées.

Le rêve de Nicolas Sarkozy est donc de dissoudre l'opposition. Rien à voir avec une quelconque ouverture.

4) Petits marchandages entre amis

Sarkozy a appelé Védrine. Védrine a refusé les Affaires étrangères, dis-t-on. Il a appelé Kouchner. Ce dernier a accepté.

Chacun sait qu’il y a un monde entre les idées de Védrine et celles de Kouchner, notamment sur le Moyen-Orient. Peu importe : ce qu’il fallait c’était un scalp de socialiste. Et comme le quai d’Orsay, ça ne se refuse pas, le scalp est tombé dans l'escarcelle de Sarko l'ouverture.

La carotte : voilà un des secret du sarkozysme (le deuxième étant bien sûr le bâton). Proposer un ministère, un secrétariat d’Etat, un poste dans un cabinet, un emploi, un stage rémunéré, une décoration… Sarkozy sait que tout homme est achetable. Surtout les vaniteux, qui estiment qu’on ne les reconnaît pas à leur juste valeur.

Avec les UDF ça a été du gâteau. Un UDF c’est volatile. Limite faux cul. Ça vire à gauche, à droite. Selon le vent (qui fait tourner les girouette, disait Edgar Faure). Un UDF c’est craintif. Ca craint le vent, justement. André Santini avait peur de ne pas être réélu député. Il tremblait de peur, Dédé. Donc, Dédé la tremblotte a lâché Bayrou le Don quichotte des beaux quartiers. Résultat : non seulement le Dédé a été réélu les doigts dans le pif, mais il est ministre. Il a tout compris à l'ouverture. Malin le Dédé!

5) Au dessus des partis et des principes

Pour parler d’ouverture, il aurait fallu que Nicolas Sarkozy annonce sa volonté d’ouvrir, comme l’a fait Bayrou.

Il aurait fallu que les accords qu’il a passés avec des personnes se fassent avec l’aval de leurs partis respectifs (ou tout du moins pas en total désaccord avec eux).

Là, rien de tout cela. Ce sont des débauchages. Le Parti socialiste est cocufié en beauté. Tant pis pour lui, direz-vous ! Tant mieux, même. Ca l'obligera à bouger...

7 juillet 2007

Héros

C'est les vacances, depuis mercredi soir. Mes enfants commencent à décompresser, à se reposer un peu à la maison avec leur maman. Cela fait déjà 5 ans que je suis "parent d'élève élu", au conseil de l'école maternelle. Et je ferai certainement de même pour la dernière année de mon petit gars avant la "grande école". Cette école maternelle est une école d'application. Les enseignants changent presque tous tous les ans. Ce sont donc les auxiliaires (employées par la mairie sous l'acronyme barbare ATSEM) qui assurent la continuité. Elles sont admirables de gentillesse et d'humanité (je sais, pour les "décomplexés", c'est un gros mot). Car il y a des situations difficiles à gérer (où l'on découvre dans les conseils d'école que tel ou tel enfant n'était là que parce que temporairement placé, ou parce que sa mère, victime de violences, a été hébergée dans un foyer proche...) et cependant, ça se passe bien. Même les enseignants, si décriés, sont des professionnels qui font correctement leur travail, et même plus.

J'ai été touché par ce texte de Guy Birenbaum, qui va plus loin encore dans l'analyse et qui nous renvoie à la figure la désinformation autour de nombreux problèmes de société...

Je cite...

Hier, j'ai eu la chance de passer deux belles heures avec un prof qui enseigne dans une école primaire. Je ne vais pas le citer nommément (son prénom - François - est modifié), ni le localiser précisément, pour qu'il n'ait aucune difficulté à cause de moi. Disons simplement qu'il a la cinquantaine et 20 ans d'ancienneté dans une même zone ; surtout, il ne travaille pas dans un quartier a priori défavorisé. Pourtant, ce qu'il m'a expliqué sur l'évolution de son métier et, surtout, sur les modifications profondes de la population - de la société - est alarmant.

François, au cours de ces dix dernières années, a vu ses collègues, ses élèves et leurs parents devenir totalement "différents". "Changer" comme dirait l'Autre.

Quand il a commencé par là, j'ai tout d'abord bêtement cru qu'il voulait me parler, sans oser l'exprimer directement et brutalement, des problèmes spécifiques que poserait l'augmentation du nombre d'enfants d'origine étrangère. "Tu veux dire qu'il y a trop d'étrangers dans l'école ?" ai-je alors osé, sur la pointe des pieds, me surprenant moi-même des mots qui venaient de se bousculer maladroitement dans ma bouche. Il m'a souri. Un peu tristement. Désolé que j'ai pu dire ça. J'étais complètement à côté de la plaque.

Non, François me parlait simplement d'une modification sociale de fond. Il voulait m'expliquer l'aggravation de la situation de TOUS les enfants, toutes origines confondues et surtout tous milieux sociaux mêlés. François voulait me faire toucher du doigt un climat général détérioré qui, dans son école, ne provenait absolument pas de problèmes d'origine, de langue ou d'"identité nationale" ! Nous n'avons d'ailleurs JAMAIS utilisé ces mots dans notre conversation... Non, ce dont François me parlait déjà, là, d'entrée, c'est d'une crise globale et massive qui atteint de plein fouet tous les "acteurs" du "système" (quel vocabulaire de merde...) : parents, élèves et profs.

En gros, de plus en plus de mômes arrivent à l'école totalement "largués". Parce qu'ils sont comme "abandonnés" par des parents qui vont eux-même très mal, trop mal. Ce sont donc les profs - qui, souvent, ne vont pas mieux du tout - qui doivent sortir ces mômes de la flotte, comme ils le peuvent...

Les profs justement.

François l'a vu venir l'élection Présidentielle...

Lui, pour le coup, il l'a anticipée.

La parole de ses collègues, en salle des profs, s'était libérée - décomplexée ! - depuis de longs mois. Le boulot est si dur, l'afflux de problèmes si quotidien, le stress si présent, que nombre de ces profs ont été intéressés puis séduits par les discours de Nicolas Sarkozy. Autorité, mérite, efficacité, professionnalisme... La mayonnaise a pris chez certains.

Là, il faut être bien calé dans sa petite chaise et rengainer ses certitudes pour entendre et respecter la sévérité de François sur la gestion par la gauche les socialistes de l'Éducation. C'est bien simple, avec ses termes comptés - jamais une virgule de trop - et son phrasé précis, François n'a utilisé que deux mots dans toute la conversation pour qualifier la façon dont les gouvernements socialistes ont traîté du problème de l'Éducation, lorsqu'ils étaient aux affaires : une "attitude suicidaire". François a tout de même voté Royal (il ne m'a jamais parlé de Bayrou) mais il l'a fait par habitude et en ayant deviné que la défaite était au bout.

Mais laissons la politique. Le plus intéressant est venu lorsque François en est arrivé à me raconter ce qu'il voit de plus flagrant et de plus grave. Ce qu'il nomme "le sentiment de culpabilité" des collègues, qui n'y "arrivent plus" ; parce qu'ils ont le sentiment de ne "pas faire assez" pour les enfants. Et qui du coup perdent pied, petit à petit. De plus en plus stressés. De plus en plus coupables, ils fuient l'école à la sortie, dès 16h30 ; "la tête rentrée dans leurs épaules" - il mime le geste et l'attitude - , et rentrent bien vite chez eux. Le lendemain, ils reviennent, souvent en retard, se sentant encore plus coupables...

Bien sûr, avec des bouts de ficelles, de la bonne volonté et du courage, il y a toujours des héros (ce mot là est de moi, il ne parlerait jamais comme ça de lui, de ses collègues et de son travail, François...) qui parviennent à tirer des gamins de dix ans du gouffre qui est déjà bien ouvert sous leurs petits petons. Comme François... Pour à peine deux Smic par mois (avec vingt ans d'ancienneté, c'est moi qui le rappelle...). 2000 euros qu'il parvient à atteindre difficilement, mais parce qu'en plus des heures de cours, il surveille la cantine - donc il ne prend pas de pause le midi... -. Mais, il ne se plaint pas. Il vit bien. Il va bien.

Il faut surtout l'entendre en parler de ces ses mômes, François.

Voir ses yeux pétiller et irradier toute la terrasse du café, à Montparnasse, lorsqu'il évoque modestement son sentiment d'avoir réussi à leur expliquer un tout petit truc. Rien. Un machin modeste. Juste à la fin d'un film qu'il leur a projeté la veille. Ils ont compris. Il est heureux.

L'écouter s'inquiéter pour l'un d'entre-eux qui va plus mal ou juste moins bien que d'autres.

Lire simplement l'humanité qui tient presque toute entière au fond de ses yeux fatigués. Et dans son sourire aussi...

Le regarder refaire le geste qu'il a du accomplir, quelques semaines plus tôt, quand un gamin s'est trouvé mal dans la classe. Là, au café, devant moi, François ne me raconte pas l'histoire banale d'un malaise. Il revit complètement la scène. Il l'a vu tout d'un coup, ou il l'a senti peut-être, qui tombait de sa chaise, le gamin. Il a réussi tout doucement à amortir sa chute pour l'empêcher de se fracasser la tête sur le sol.

Là, au café, François, sa tête penchée, en face de moi, vient d'ouvrir grand ses deux bras et d'embrasser le vide ; certainement très exactement comme il les a ouverts puis refermés ce jour-là, pour protéger l'enfant... Il accompagne toujours la chute. Il le serre fort. Il allonge l'enfant. Il le rassure. Il prévient.

Tout va bien se passer.

Ils ont quand même de la chance ces nos mômes d'avoir des gars pareils pour leur tendre les bras et les rattraper. Juste avant qu'ils ne tombent.

Selon les Échos, le gouvernement souhaite supprimer 17.000 postes dans l'Education nationale l'an prochain, et non 10.000 comme l'a indiqué la semaine dernière le ministre Xavier Darcos...

6 juillet 2007

Incompétence (encore)

Lu dans le Monde :

La cour d'appel de Paris a jugé, vendredi 6 juillet, que le contrat nouvelles embauches (CNE) était contraire à la convention 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT), estimant déraisonnable le délai de deux ans durant lequel un salarié embauché en CNE peut être licencié sans motivation.

La 18e chambre de la cour d'appel, présidée par Jean-Louis Verpeaux, était saisie d'une décision rendue le 28 avril par le conseil des prud'hommes de Longjumeau, dans l'Essonne, qui avait requalifié un contrat nouvelles embauches en CDI (contrat à durée indéterminée), jugeant que l'ordonnance créant le CNE était contraire au droit international, un jugement de principe qui constituait une première.

"À L'ENCONTRE DES PRINCIPES DU DROIT DU TRAVAIL"

Dans sa décision, la cour d'appel a repris, en le complétant, l'argumentaire développé en première instance. Elle constate d'abord que "durant une période de deux années, le CNE prive le salarié de l'essentiel de ses droits en matière de licenciement", le ramenant à une situation où la charge de la preuve de l'abus de la rupture du contrat de travail lui incombe. "Cette régression, qui va à l'encontre des principes fondamentaux du droit du travail dégagés par la jurisprudence et reconnus par la loi, prive les salariés des garanties d'exercice de leur droit au travail", estime la cour.

La juridiction s'étonne d'ailleurs :"Dans la lutte contre le chômage, la protection des salariés dans leur emploi semble être un moyen au moins aussi pertinent que les facilités données aux employeurs pour les licencier" et remarque "qu'il est pour le moins paradoxal d'encourager les embauches en facilitant les licenciements". En conséquence, "le contrôle de proportionnalité ne permet pas de considérer que le délai de deux années institué par l'ordonnance du 2 août 2005 soit raisonnable" au regard de la convention 158 de l'OIT, conclut la cour.

Créé en août 2005, le CNE est un contrat de travail à durée indéterminée destiné aux entreprises de vingt salariés ou moins, débutant par une période de deux ans pendant laquelle l'employeur peut licencier son salarié sans avoir à fournir de justification.


Quel est le parti politique "maîtrisant ses dossiers" qui est à l'origine de ce texte ?